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« Agacés par les roulements de tambours, les sonneries de clairon et la turbulence des voltigeurs, vexés d'avoir à travailler clans des locaux vétustes incompatibles avec la dignité de leur fonction, les magistrats réussissent, dès le 3 septembre 1851, à provoquer une délibération du conseil général qui reconnaît la nécessité de construire un palais de justice à Bastia.
Les choses, au début, sont menées rondement. Par l'intermédiaire de l'Ère nouvelle, du 26 mars de l'année suivante, le maire François Lota "s'empresse de porter à la connaissance de ses concitoyens le contenu de la lettre, par laquelle Xavier de Casabianca, ministre d'État, lui annonce que par ordre du prince-président, une somme de 100 000 francs vient d'être ajoutée au budget de 1852 pour commencer les travaux du palais de justice de Bastia. Le décret que le prince-président vient de signer fixe à 300 000 francs la part contributive de l'État dans la dépense totale."

Cela, avec la libéralisation du régime douanier citée plus haut, est le deuxième exemple concret de l'intelligence du gouvernement et de sa bonne volonté envers les corses. On peut croire que la réflexion de l'empereur, à Ajaccio en 1860: "La Corse, pour moi, n'est pas un département comme les autres, c'est une famille", est plus qu'un mot aimable de circonstance.

Le marché de la construction du palais au "jardin des ci-devant jésuites" est enlevé par l'entrepreneur Monlaü et l'architecte Cotin pour un devis de 200 000 francs. C'est le 25 juillet 1852 que l'on pose la première pierre en présence d'Alexandre Colonna d'Istria, Premier Président, de Sigaudy, Premier Avocat Général, Thuillier, Préfet, François Louis Maire, et Guasco, Curé de Sainte-Marie. Toutes ces personnalités prononcent un discours ; un banquet réunit plus de cent personnes. La fête se termine sur un feu d'artifice. Les travaux durent six ans. C'est seulement le 12 mai 1858 que l'on inaugure solennellement cette belle bâtisse aux lignes sobres et harmonieuses. Elle trône majestueusement sur un quartier qu'elle a métamorphosé. »

(**) Extraits de Bastia regards sur son passé, édition Berger-Levrault 1983